Tête de classe et de concours, la jeune Eléonore de Staël est devenue parfumeur-créateur 100% naturel par vocation, par amour du végétal et par engagement. Ses créations traduisent l’unicité et l’exclusivité qu’elle donne à ses compositions courtes et son goût réel pour le beau. Personnalité à suivre...

« Toute petite, je voulais être nez. Les enfants de mon école me disaient : « mais tu es déjà née ». Alors, je leur montrais le bout de mon nez ». Ainsi commence le parcours d’Eléonore de Stael dans la parfumerie naturelle. La descendante de l’écrivaine Mme de Staël a le sens de la formule... Et pour cause ! Major de l’Institut de Parfumerie de Grasse en 2015 et lauréate de la première édition du concours de nouveaux nez en 2017, Eleonore a tout pour devenir une grande parfumeuse-créatrice 100% naturel. Avant de vivre son rêve d’enfant et que la muse ne se soit posée sur son épaule, l’histoire démarrait plutôt mal... Partagée entre passion et pression (familiale), elle passe par la case « école de commerce pour décrocher un vrai métier ». Pendant ses études supérieures qu’elle poursuit tout en sentant sa passion ailleurs, Bertrand Duchaufour, nez et ami de la famille, l’invite à « tester sa motivation » pour cette profession exigeante : celle de devenir parfumeur. 

L’école de la vie

D’abord au contact de ceux qui portent le parfum pour le compte d’une agence de grandes marques de parfumerie (Chanel, Dior...), Eléonore est repérée pour sa performance et fait un stage à Stockholm dans la Maison Christian Dior Parfums. Et puis, tout s’enchaîne avec la voie de professionnalisation à l’Institut du Parfum de Grasse et des stages, plus prestigieux les uns que les autres. La jeune artiste fait ses premières compositions dans la célèbre Maison d’Edmond Roudnitska, 1er parfumeur indépendant du XXème siècle. « Monsieur Roudnitska a créé Diorissimo et Eau Sauvage de Dior, Femme de Rochas, Eau d’Hermès... Des master pieces ! Il était également un grand défenseur du parfum comme œuvre de l’esprit ». Puis Bertrand Duchaufour lui permet, par deux fois, de faire un stage chez Accords & Parfums, temple dédié au parfum sur les hauteurs de Grasse, où artisans-parfumeurs et sociétés commerciales font œuvre commune. « J’y ai été formée par la préparatrice Myriam Compiani. C’est elle prenait en note les formules de Monsieur Roudnitska à la fin de sa vie. Myriam m’a observée faire mes premiers pas en laboratoire, m’a appris les grands principes de pesées et le respect des matières premières ». La Maison Jean Patou lui donnera accès, un peu plus tard, à de très belles matières et lui livrera les secrets de la pesée rapide dans son laboratoire.  

La synthèse : une épreuve obligatoire

Si la naturalité - « l’émotion » - est devenu son terrain de jeu et son cheval de bataille, Eléonore de Staël a commencé ses gammes avec les standards de la synthèse. « A l’école, tous les matins avant les cours, notre équipe de 4 se retrouvait autour d’un test d’olfaction de 10 matières ». Si cet exercice quotidien lui permet de reconnaître les odeurs, elle tourne vite le dos à la chimie « qui ne la fait pas vibrer et qui rend les parfums uniformes ». Elle rencontre de grands professionnels de la parfumerie naturelle comme Jean-Charles Sommerard, Stella Giordanengo, Chantal Dufargue... Le Grand prix, qu’elle décroche avec son parfum Indigo au concours des nouveaux nez en 2017, finit par légitimer sa démarche et renforcer ses convictions. 

« Le naturel sera le vrai luxe, artisanal et respectueux du vivant. » L’Atelier Français des Matières, fondé par Rémi Pulvérail et basé à Annecy, est d’ailleurs l’un de ses précieux fournisseurs.  Avec le soutien de Grace, première agence de parfumeurs indépendants, qui a flairé son talent et qui l’accompagne dans sa démarche créative, Eléonore multiplie les compositions simples, courtes et exclusives à partir d’une page blanche pour la parfumerie, la cosmétique et l’art de vivre. Aujourd’hui l’artiste a repris son indépendance et décide du libre cours de ses créations. Les parfums naturels d’Eléonore commencent à faire parler d’eux et à attirer les grandes maisons pour la création de collections ou de séries limitées. La parfumerie naturelle retrouverait-elle son âge d’or, d’avant le XXème siècle ? 

 

Légendes

Les touches à sentir de parfumeur, indispensables instruments pour restituer les créations.

Atelier de parfums en plein air comme un écho à ceux du peintre impressionniste, Claude Monet.

Le vaporisateur fétiche d’Eléonore en verre bleu de Murano.

 

25 mars, 2022